LE BIG CRUNCH


Pascaline était assise dans l’amphithéâtre à côté d’un autre étudiant qui lui avait posé la main sur la cuisse. Elle l’avait laissé faire sans rien dire, sans même réagir. Mais comme il avait fait glisser sa main un peu plus haut à l’intérieur de la cuisse, elle se pencha vers lui tout en regardant le prof qui avait inscrit quelques mots au tableau à l’intention des étudiants. Le Big-bang.
- Arrête Laurent, tu me déconcentres.
-Viens-tu chez moi après le cours.
-Peut-être, si tu me laisses écouter.
Le prof s’emportait dans un sujet qui lui tenait à cœur.
- …alors, je ne me souviens plus qui a dit? « Le passé n’existe plus, le futur n’existe pas encore, il n’y a que le présent…» Mais quel présent! La société s’écroule. Mais bon elle s’écroule depuis tellement longtemps que je pense qu’on survivra encore un peu. Je vous pose la question suivante, dans la logique des choses, ne faudrait-il pas éliminer ceux qui détruisent la terre? Ne répondez pas, c’est inutile, nous détruisons tous la terre depuis le début de l’humanité. Depuis que, aux confins de l’Afrique, l’homme est devenu l’homme, depuis que les hommes ont envahi la planète, ils détruisent leur environnement à une vitesse qui est devenue problématique pour notre survie. Quand je dis les hommes, je vous inclus tous hommes et femmes, même ceux et celles qui n’écoutent pas et moi de même qui perd mon temps à essayer de vous faire réfléchir à autre chose que le sexe.
Le prof fit une pause en regardant ceux et celles qui souriaient. Pascaline repoussa la main de son compagnon.
-Y parle de toi.
Le prof reprit son exposé avec enthousiasme.
-La terre survivra à l’homme bien longtemps après sa disparition, évidemment. À moins que ne survienne le « Big crunch » de notre vivant. Quel spectacle! Pensez-y, le big crunch! L'univers qui se recroqueville jusqu'à presque rien. Ca serait un peu comme tenter de remettre un oeuf cuit dur à son état initial, presque jusque dans le cul de la poule qui l'a pondu.
Le prof fit une nouvelle pause en grimaçant. Le étudiants l'avaient trouvé bien bonne.
- Ha oui! Quand on parle de cul, ça vous fait rire, n'est-ce pas!
Il poursuivit en souriant.
-La fin du monde, de l'univers. Pouvez-vous imaginer un plus beau spectacle. Même Michael Jackson blanchirait de tout son corps en voyant les beaux feux d'artifices. Je ne voudrais pas manquer ce spectacle ultime pour tout l’or du monde. Je voudrais pouvoir dire : « J'y étais, j'ai tout vu. C'était grandiose. Vous n'y étiez pas? Ho! Quel dommage vous avez manqué un spectacle unique au monde. C'était le dernier. Il n'y en aura plus. Tout est fini.''
Le prof reprit son souffle en riant.
-Pouvoir vérifier, de visu, une des théories de la création de l'univers. Le Big-crunch. Quelle chance. Moi si j’étais à votre place je ne pourrais plus dormir.
Le prof fit une pause tout en regardant sa montre et poursuivit
-Bon, soyons sérieux. Il y a quelque temps j'ai lu un bouquin écrit par les frères Bogdanov. L'un mathématicien et l'autre physicien. Par des calculs mathématiques savants, bien évidemment, les scientifiques sont remontés jusqu'au moment qui à précédé le Big-bang. Le moment juste avant que se forme l'énergie qui produisit le Big-bang. Un moment infinitésimal, un souffle. C'est à dire le moment ou il n'y avait rien juste avant qu'il y ait tout qui produisit le Big-bang.
Le prof fit une autre pose et se grattant la crâne et ensuite la barbichette qu’il tenait très courte et il poursuivit.
- Vous êtes toujours là? Bien! Ce que j'en ai compris et par le miracle de la pensée créatrice qui mijote en chacun de nous, à des degrés différents, bien évidemment, est fort simple et j'en suis arrivé à la conclusion suivante : Le Big-bang, c’est à dire la création de l'univers avec tout ce que cela comporte de vivant ailleurs et sur la terre, est le résultat d'une pensée divine. Divine parce que astronomique. Je vous explique. Tout comme se forme une pensée dans votre cerveau, si faible soit-il, il y a un moment ou il n'y a pas de pensée, rien, le néant. Mais il y a tout de même tous les éléments qui serviront à cette pensée en devenir, là, en attente. Alors, le temps d'un souffle, l'idée survient dans votre esprit comme une explosion et elle meurt tout aussi rapidement pour faire place à une autre idée ou pensée de la même manière et ainsi de suite. C'est à dire un Big-bang et un Big-crunch à l'échelle de votre cerveau. Selon la théorie acceptée, le Big-bang sera nécessairement suivi d'un Big-crunch. Donc, si vous me suivez toujours et même si vous dormez, je vous l’annonce sans chichis, l'univers est une idée qui s'exprime. J'espère que ça vous en bouche un coin.
Le prof posa son regard sur l’assemblée d’étudiants et poursuivit.
-Vous êtes toujours avec moi, bien!
Le prof fit une nouvelle pose pour entendre les rires des étudiants. Il sourit de plaisir et poursuivit.
- Soyez tout de même rassurés, tant qu'il y aura expansion de l'univers, nous pouvons vivre tranquilles sans se soucier du big-crunch. Mais méfiez-vous du jour où l'univers arrêtera de se gonfler un peu comme si l'univers avait terminé son inspiration et qu'il s'apprêtait à tout expirer. Adieu veaux, vaches cochons, couvées... Soyez au aguets, interrogez le ciel. Ce sera le signal du sauve qui peut. N'emportez rien avec vous ce sera inutile. Là où vous serez il n'y aura plus rien. Le grand retour vers rien. Tout le monde cul par dessus tête. Un tsunami à l'échelle interplanétaire. Même un trou noir semblera ridicule à côté de cette vague de destruction totale. Voilà pour le big-crunch. Comme l'univers que nous habitons, malgré le petit espace que nous occupons, est une pensée divine, à défaut d'un autre qualificatif, il serait normal de se demander si chaque événement de chaque vie humaine à été planifié par cette pensée très nettement supérieure, il faut bien se l'avouer, ou si dans cette création, les éléments qui la composent ont la jouissance de faire évoluer cette pensée dans des événements originaux, hors du contrôle de la pensée originelle. Le libre arbitre si vous préféré. Par contre, si vos schèmes de pensée sont encore accrochés aux enseignements des apôtres de Jésus-Christ, qui soit dit en en passant étaient une joyeuse bande de ti-counes, en plus d'être des pissous, comme un bon nombre de Québécois, vous êtes du troupeau de croyants aux miracles. C'est tellement plus simple. Le paradis si vous avez mené une bonne vie de bien. Pauvres vous autres.
Le prof fit une pause pour prendre une gorgée d'eau.
-Est-ce que la création existe par elle-même? Je vous pose la question mais sans toutefois vous demander d’y répondre tout de suite.
Le prof regarda encore une fois sa montre et reprit.
-Demandons-nous si nos pensées meurent ou si elles existent par elles mêmes une fois créées? À suivre... comme dirait le vieux monsieur rieur. Alors, pour dans deux semaines, répondez à une des questions qui ont été posées durant mon exposé. Ha! Pour ceux et celles qui ne suivaient pas, je ne serai pas disponible pour vous répéter les questions. Vous demanderez à ceux et celles qui suivaient. Passez tous et toutes une bonne semaine. N'oubliez pas d'interroger les cieux.
Le prof prit ses feuilles de notes qu’ils ne consultaient jamais et sortit de la salle. Pascaline sortit suivi de son empressé compagnon qui l’avait prise par la taille. Elle s’était défaite de l’emprise en tournant sur elle-même. Le garçon lui demanda :
-Tu viens passer la nuit chez moi?
-Non! Je rentre chez-moi.
-Tu m’invites chez-toi
-Non! J’ai pas envie de me faire tripoter.
-Coudonc, tu sais pas ce que tu veux?
-C’est possible, mais je sais c’que j’veux pas.
Laurent quitta Pascaline de mauvaise humeur pour aller rejoindre un groupe de copains. Elle poursuivit vers l’escalier pour sortir et prendre le métro dans le but d'aller rejoindre une autre personne plus âgé qu'elle, qui lui faisait l'amour comme elle aimait être baisée. Son vieux cochon.

Sur la rue Sainte-Catherine, le prof marchait d’un pas rapide et déterminé. Il s’arrêta derrière sa voiture ouvra le coffre et y déposa sa mallette, puis il monta devant. Il partit en direction de l’est. Il devait être aux alentours de dix heures trente. La voiture roulait lentement. En dépassant la rue Amherst, dans le village, il ralentit, en cherchant des yeux sur les trottoirs de chaque côté. Il s’arrêta à un feu rouge et fit signe à une prostituée de race noire. Elle portait une blouse blanche ouverte sur sa poitrine retenue par un soutien-gorge qui soutenait bien tout en laissant voir beaucoup et une jupe rouge à mie cuisses. Elle s’approcha de la voiture ouvrit la portière du côté gauche et monta.
-Hello professor!
-Bonsoir, Amanda!
-Ça fait a long time. Je pensais que je te reverrais plus.
Amanda avait la voix éraillé et grave et s’exprimait en français avec un accent anglais très prononcé.
-He bien tu vois, je suis revenu!
-Good for you et good for me. Tu veux quoi tonight?
Le prof regarda Amanda en souriant.
-Comme d’habitude Amanda.
-OK! Well you know, il faut aller dans un petite rue.
-Je sais. Allons-y. Dit-il en souriant avec amabilité à la pute.
Le prof accéléra et roula jusqu’a l’intersection suivante et tourna sur la droite. Il stationna la voiture sous un lampadaire. Amanda se tourna vers le prof en ouvrant ses cuisses. Amanda s’était fait poser des seins mais avait conservé son pénis. Le prof regardait intensément la poitrine d’Amanda.
Alors professor, je fais le blow job maintenant, ou tu veux sucer mes tits?
Le prof caressa d’abord les seins d’Amanda.
-Je vais te sucer.
-Mais tu sais que il faut payer plus si tu touches mes tits, you know, ça m’a couté la peau de mon cul de faire mes tits.
-Je vais payer.
-O.K! Suck me, petit cochon.
Le prof approcha sa bouche des seins d’Amanda et les suça tour à tour avec intensité. Elle fouilla l’entre jambe du prof.
-Ho! Tu es vraiment horny ce soir.
Amanda pris la main du prof et la dirigea vers son propre sexe. Elle savait que le prof aimait le toucher mais qu’il n’osait pas le faire lui-même. Elle avait presque de la tendresse pour lui. Quand le prof fut rassasié des seins d’Amanda, il approcha ses lèvres du sexe noir du travesti sans le prendre dans sa bouche mais en promenant se lèvres dessus. Quand il eut terminé, de badiner avec la queue du black elle lui descendit la fermeture éclair pour lui prendre son pénis en érection.
-You know, tu as un gros bamboo pour un white boy.
Comme le prof ne disait rien, Amanda poursuivit. Elle connaissait bien les gouts du professor. Elle était habituée à ce qu’il soit silencieux.
-Relax, je vais te sucer maintenant. I’m gonna suck you good.
Le professeurr reposa sa tête en arrière en fermant les yeux pendant qu’Amanda lui faisait du bien. Il posa sa main sur la tête du travesti en lui imprimant une petite pression de va et vient. Au bout de quelques secondes de ce petit manège le prof éjacula dans la bouche d’Amanda en exprimant un léger son de satisfaction. Amanda sortit un papier mouchoir de son sac à main cracha le sperme du prof par la fenêtre et s’essuya la bouche.
-Well, maintenant, I need a drink.
Le prof sortit quelques billets de vingt de dollars de son portefeuille et les tendit à Amanda qui les prit et les fourra dans son sac. Elle sortit de la voiture et cracha à nouveau par terre.
-Goobey professor, see you.
-Bonsoir Amanda.
Le travesti ferma la portière et se dirigea vers la rue Sainte-Catherine. Le prof redémarra et emprunta le Boulevard René-Lévesque en direction du centre ville. Plus loin sur la quarante, il tourna la tête du côté du passager.
-Je savais que tu serais là Madeleine.
-Je suis toujours là quand tu as besoin de moi.
-Je peux me débrouiller sans toi.
Le prof regardait la route devant lui. Madeleine gardait le silence. Alors il s’adressa à elle.
-Tu dis rien?
-Tu t’étais pourtant promis de ne plus revoir Amanda.
-Ha! Nous y voilà. Les reproches.
Il poussa un long soupir.
-J’ai pas vraiment besoin que tu me fasses la morale Madeleine. J'ai des besoins sexuels que tu ne peux pas me rendre.

Après avoir traversé le pont de l’Île-Bizard, il tourna à droite jusqu’à la rue des Érables et stationna dans l’entrée de la maison à côté d'une autre voiture. Après avoir repris sa mallette du coffre de la voiture, il entra chez-lui. L'infirmière lui avait ouvert la porte.
-Bonsoir, Sabrina.
-Bonsoir, Monsieur.
Il se dirigea vers le salon qui avait été transformé en chambre d’hôpital pour les besoins de son épouse.
-Comment va Madeleine ce soir?
-Elle va bien monsieur, comme d’habitude. Elle a bougé les yeux quelques secondes cet après midi. Je l’ai lavé pour la nuit.
-Merci Sabrina.
Le prof s’approcha du lit. Il regardait Madeleine qui ne bougeait pas, les bras posés le long de son corps immobile. Il lui caressa la main et s’assit sur la chaise qui était posée à côté de la tête du lit à son usage. Madeleine et Jean-Pierre étaient mariés depuis 20 ans. Ils s’étaient rencontrés à l’université. Lui faisait un doctorat en philosophie, elle étudiait en sociologie. Elle était tombée amoureuse de lui, un genre de coup de foudre. Il parlait beaucoup, avait des idées bien arrêtées sur presque tous les sujets et s’exprimait avec force et conviction. Elle était plutôt timide et réservée. Ils se retrouvaient souvent avec des copains dans un café, toujours le même. Il l’avait invité chez lui un soir, il avait été séduit par sa généreuse poitrine. Ils ne s’étaient plus quittés, malgré plusieurs infidélités de sa part. Elle avait toujours fermé les yeux sur les aventures de son mari avec ses étudiantes, croyant qu’elle en était la cause, s’accusant elle-même d’être insensible aux crises d’angoisses fréquentes de son époux. Il était brillant mais fragile. Elle était timide mais forte. Elle était sa bouée. Un dimanche qu’ils étaient allés faire une ballade en vélo sur la piste cyclable, aux environs du marché Atwater, elle avait perdu la maîtrise de son vélo et était tombé en se frappant la tête sur un bloc de béton. Malgré son casque de protection le choc avait été très violent. Elle était restée dans un état végétatif. Jean-Pierre avait voulu s’en occuper personnellement et l’avait fait installer chez eux. Après quelques jours il s’était rendu compte qu'il n'en viendrait pas à bout tout seul. Il avait alors décidé de faire appel à de l’aide infirmier privé de jour et s’en occupait la nuit. Une bonne partie de ses revenus y passait malgré les prestations des assurances et le peu d’aide du gouvernement.
Jean-Pierre regardait Madeleine noyée dans son silence. Il pensait à toutes ces années passées. Il l’avait aimé par nécessité, pour calmer ses angoisses et éviter la solitude, comme un enfant marqué. Elle aurait pu être une autre. Il avait simplement besoin d’une grande personne pour s’ancrer à la vie, un port d’attache, et d’une maîtresse permanente pour ses appétits sexuels débordants. Elle avait été là au bon moment et elle l’avait adopté. Ils s’étaient habitués l’un à l’autre. Elle avait découvert peu à peu toutes ces faiblesses et ces angoisses. Il avait profité de sa force et de sa grande générosité. Ils n’avaient pas eu d’enfants. Le corps de la femme ayant peut-être refusé les gènes de l’homme avec qui elle vivait.
L’infirmière s’approcha de Jean-Pierre.
-Voilà monsieur, j’ai terminé.
Jean-Pierre se retourna
- Merci Sabrina. Ha! Au fait est ce que ça fonctionne pour la fin de semaine prochaine.
- Oui Monsieur, j’ai un collègue qui a accepté de venir veiller sur Madeleine.
- Bien! Merci Sabrina.
- Alors bonsoir monsieur.
- Bonsoir.
Jean-Pierre regarda la jeune femme noire quitter la pièce en admirant ces bonnes fesses bien rondes. Quand elle eut refermé la porte d’entré, Jean-Pierre fouilla dans son portefeuille et en sortit une petite clef. Il déverrouilla la serrure du tiroir de la commode en métal à côté du lit. Il en sortit une petite boîte en acier inoxydable. Il ouvrit la boîte qui contenait une fiole et une seringue. Il prit la petite bouteille et admira le contenu translucide. Il regarda sa femme. «Désolé Madeleine, je ne peux pas.» Il remit la potion dans la boîte à côté de la seringue, la referma et la fourra dans la poche de sa veste. Des larmes coulaient de ses yeux. Il lui prit la main et la porta à ses lèvres. Après quelques instants, il se leva et alla dans sa chambre pour faire son bagage et y déposa sa précieuse boîte de métal. Après avoir soupé frugalement, il revint auprès de Madeleine afin de l’installer pour la nuit. Il lui souleva la tête pour refaire son oreiller et cela terminé il déposa un baiser sur son front. Il hésita un instant puis il glissa sa main sur le ventre de sa femme jusqu’à son sexe pour la caresser. Il posa sa tête contre le lit, plongea deux doigts dans le vagin de Madeleine, les retira et les porta à ses narines pour en humer le parfum. Il posa la tête sur le rebord du lit et après quelques secondes il se mit à rêver en faisant le tour de sa vie, sa '' putain de vie de merde.''
Il ferma les lumières du salon et alla se coucher. Il ne dormait pas beaucoup, jonglant avec les planètes, l'univers, cherchant à comprendre, comme un enfant, le but de la vie. Le Big-Bang, le Big-Crunch. Il se voyait assistant à la fin de tout comme à un spectacle, se reprochant de ne pas être assez intelligent pour comprendre. Il croyait que la solution devait être toute simple, mais n'arrivait pas à mettre le doigt dessus. L'univers en expansion... mais où?
Il s'imaginait assis dans un théâtre céleste une jeune femme noire nue, délicate avec un sourire à faire pleurer de bonheur, assise sur ses genoux et qui ne se doutait de rien de la fin des temps. Tout s'écroulait et elle lui demandait de lui acheter des bijoux. Ça le faisait sourire. Il avait commencé par se la décrire grande et mince et avec le temps lui avait dessiné une poitrine magnifique avec des mamelons charbon bien formés, un faciès de Néfertiti, des chevilles de gazelle, des petites fesses rebondies, de grands yeux de biche. Il en était amoureux. Il lui arrivait de se toucher en pensant à elle, la tête enfouie dans son oreiller en l'appelant, comme il allait jouir, du nom qu'il lui avait donné. Assia! Assia! Assia!Haaaaaaaaa!
Ses voisins de spectacle l'enviaient. Les autres hommes lui souriaient aimablement d'un air entendu. Parfois il se voyait seul dans la parterre, comme un seigneur. Elle lui passait la main dans les cheveux, un peu comme sa mère , il y a bien longtemps.
D'autres fois, la salle de spectacle était pleine à craquer de personnes en costumes de clowns. Ha! Ha! Ha! Il riait aux éclats quand les nains se courraient après dans les allées. Ou alors c'étaient des hommes en smoking qui étaient accompagnés par des madames déguisées en arbres de Noël, des glins-glins aux oreilles. Des riches qui croient pouvoir se payer de bonnes places au ciel.
Il aimait qu'elle se plaignit de sa petite voix fluette :
- Ça va commencer bientôt mon chérie? Tu sais tu aurais pu m'acheter un boubou pour l'occasion... je n'ai rien à me mettre. Je suis toute nue. Les vieux messieurs me regardent. ça me gène un peu tu sais. Tsyyyrrrrrrr.
Oui mon bébé, tu verras je t'achèterai un boubou magnifique cousu de fil d'or. Tu seras une reine.
C'est le moment qu'il préférait, quand sa Peul s'accrochait à son cou en se blottissant contre lui pour le remercier, toute joyeuse de devenir une reine. Il lui caressait les hanches, l'embrassait dans le cou, lui mordillait l'oreille. Elle avait une peau noire satinée comme le bois d'ébène qui a été poli et huilé, mate et salée. Elle lui chuchotait : Hooo! Mon chérie, tu bandes. Tu restes tranquille, je ne veux pas qu'on nous remarque. Hi! Hi! Hi! Je t'aime.
Il assistait en direct à la fin du monde sur des écrans géants dont les images étaient transmises du fin fond de l'univers par un procédé d'effet miroir spatial d'une simplicité déconcertante qu'il avait découvert en méditant sur le fonctionnement de l'espace interstellaire. Cette découverte avait fait la une des journaux spécialisées. Les autres scientifiques s'attendaient à ce qu'il reçoive le Nobel. On le reconnaissait dans l'assistance. Il avait fière allure quand il se levait sous les applaudissements polis des spectateurs privilégiés. D'abord son voisin immédiat qui le félicitait tout en souriant à la petite black si charmante. '' Félicitation cher monsieur, c'est une découverte qui vient à point''. Ensuite la rumeur circulait de banc en bancs, de rangée en rangées. Ha! Quelle fin spectaculaire. Une consécration au dernier jour de l'Humanité. Ça lui donnait des ailes de Pégase, une verge de centaure et des envies de posséder sa petite Assia, qui ne demandait qu'a le satisfaire en soupirant : Oui! Vas-y bébé, vas-y! Montre moi que tu es fort!
Il s'endormait au petit matin alors que le jour se levait. Pour quelques instants heureux, puisque le rêve était sa seule véritable évasion, surtout quand il n'était pas habité par ses idées noires de vengeance. Mais son heure viendrait.
Il revenait à lui vers les onze heures trente, réveillé par la présence de l'infirmière du matin. Il se masturbait parfois dans la douche, histoire de se remettre les yeux en face des trous, comme il s'amusait à se le dire, sauf les matins où il se préparait pour une rencontre avec la petite sourde. Bérénice. Il ne voulait pas se retrouver en panne d'érection.